La brume a essayé

Ce matin, la brume a fait sa première tentative de l’automne.

La ville s’est réveillée toute embrumée. Encore ensommeillée. La nature a voulu faire durer le mystère de la nuit en prolongeant l’ombre. En nous gardant dans un halo blanc laiteux dont on ne sait pas si on va en sortir indemne.

La brume s’étendait comme un voile de mystère sur la ville. Une ambiance de film noir.

C’est que la brume ne s’annonce pas. Elle s’installe et ne nous quitte plus. Un peu comme à l’image du plat pays de Jacques Brel. Un paysage comme vierge de tout, atone, silencieux, plat.

Quand on parle de brume ici, ce n’est pas la petite brume légère. C’est plutôt le brouillard. Epais, dense, pesant. On sait que le brouillard peut s’installer et durer le mois entier.

Le mois entier sans avoir l’impression que le jour se lève. Le mois entier dans une sorte de bulle grise.

Ce genre de douceur d’automne, on s’en passerait bien. Surtout, qu’il suffit de rouler quelques kilomètres pour sortir de la ville et retrouver la couleur. Fini le film en noir et blanc.

Alors voilà. On a le choix entre se laisser embuer, se rembrunir et vouloir rester terré chez soi. A maudire ce foutu climat.

Et tirer parti de ces aléas. Après tout, c’est l’automne. Rien ne sert de se lamenter sur la chaleur qui a disparu. Ce n’est pas comme si c’était la première fois.

On peut aussi se laisser envelopper par cette sorte de pesanteur, lourde et bienveillante comme le demi-sommeil qui vient après un repas trop chargé. Il y a cette sorte de flottement. Repus, on sent la fatigue s’abattre sur nous et l’envie presque irrépressible de s’étendre.

A bien y regarder, la brume peut-être propice au ralentissement. Comme en apesanteur. On est tenté de prendre le temps de faire les choses. De revenir à l’essentiel. Pourquoi pas de rester un peu plus chez soi. Tranquillement. Après tout, ça n’a jamais tué une mouche ou fait de mal à personne. Bien au contraire.

De toute façon, rien ne sert de courir. Le changement de saison nous rattrapera tôt ou tard.

Autant prendre le bon côté des choses. On est moins tenté d’aller voir dehors si on y est. Et on peut enfin ranger les photos. Préparer des petits gâteaux. Savourer la nouvelle confiture de prunes, tout juste mise en pot. Finir ce livre sur le chevet depuis des mois. Toutes ces choses que l’on avait mises de côté avec l’été.

Avec la brume, on ne sait jamais combien de temps ça va durer. Se lèvera, se lèvera pas. C’est la roulette russe. Avec un peu de chance, c’est comme aujourd’hui.

Ce matin, la brume a fait sa première tentative. Elle a essayé de s’installer. Mais n’a pas tenu bon. Le soleil en a eu raison.

Il aura quand même fallu la matinée. Mais, quel plaisir de voir le soleil pointer le bout de son nez et opérer sa percée.

© Par Cloé Przyluski

 

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