Ecoute chaque matin l’incomparable nostalgie de la journée

C’est plus fort que moi. J’ai beau savoir en mon for intérieur que ce monde doit changer et se réinventer, je ne peux m’empêcher d’être nostalgique d’un temps qui ne sera plus et surtout qui ne peut plus être.

Nostalgie d’un temps des cerises dépassé et délaissé que je continue d’idéaliser malgré moi.

Nostalgie de la facilité et du confort dans lequel j’ai vécu jusque-là sans me soucier d’avoir abandonné mon pouvoir d’agir.

Nostalgie du temps de l’insouciance qui semble s’être évanoui au profit de la peur institutionnalisée.

J’alterne entre cette nostalgie prégnante et l’envie de renverser la table. J’interroge la responsabilité de mes actes.

De tous mes actes. Même les plus insignifiants. Y compris et surtout ces petits actes de compromission que je fais chaque jour en croisant les doigts pour que les scrupules ne viennent pas me pourrir la vie trop longtemps.

C’est fou la facilité que l’on a à fermer les yeux pour oublier et essayer d’avoir la conscience tranquille.

C’est fou la facilité que l’on a à se dire que l’on fera mieux demain.

C’est fou cette facilité que l’on a à chercher à se dédouaner pour nos actions sous prétexte que l’on n’a pas le temps de se pencher sur la question.

On a beau savoir et comprendre que l’on a brûlé la chandelle par les deux bouts, on s’accroche à ce temps perdu que l’on ne retrouvera plus.

On voudrait bien trouver quelque chose à récupérer de ce temps. Quelque chose à reconsidérer, à redorer, à amplifier. Quelque chose à quoi se raccrocher. Qui a toujours existé et qui est à portée de tous, partout, à toute heure, en tout temps. On n’aurait alors pas tout perdu.

Il y a bien quelque chose que l’on a laissé en déshérence, qui permet pourtant de goûter au sel de la vie : l’attention en toute chose.

L’attention en toute chose permet de reconsidérer la vie dans ce qu’elle a de plus simple et de plus vrai, de la considérer avec plus de respect et dans la conscience de son caractère sacré. Elle redonne ses lettres de noblesse à toute existence.

Cette incomparable nostalgie que l’on ressent. Ce plaisir d’être dans l’instant. Cette sensation chaleureuse d’être là où l’on devrait être et que rien ne peut venir troubler. Ce truc insaisissable qui rend le moment inoubliable. Tout cela naît d’une attention constante et soutenue aux choses simples de la vie. Ces choses qui nous ramènent à l’essentiel et nous permettent de voir là où est notre essentiel.

Prêter attention. Faire attention. Ecouter avec attention. Changer notre rapport au monde et la perception que l’on en a. Passer du regard pressé au regard curieux, intéressé, prêt à s’émerveiller d’un rien.

Immanquablement on réalise que la somme des petits riens forme un tout dont nous sommes bien responsables. On prend conscience que chaque acte a son importance et que nous avons le pouvoir de reprendre la main sur ce qui semble nous échapper, petit rien après petit rien.

Cloé Przyluski

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