Il est des instants de grâce qu’il faut savoir reconnaître pour ce qu’ils sont.
Le souffle court, je me retiens de respirer tant la situation m’étreint, m’effraie, m’épuise. En moi, le désespoir se dispute à l’impuissance. J’ose à peine prendre la parole tant le dérisoire est proche.
Pourtant, quelque part, là, à ma fenêtre, la vie m’appelle. Je ne peux m’empêcher de regarder de ce côté-là pour m’échapper. Je me surprends à chercher et à trouver la vie belle au milieu du chaos.
Une force me pousse à chercher dans la moindre parcelle du quotidien. Et si c’est dans une tasse de café prise au soleil sur le bord de la fenêtre que le vrai moment d’éternité se trouve alors c’est toujours ça de pris. Et alors, que demander de plus.
Et c’est dans cette parenthèse suspendue que j’ai la chance d’apercevoir un héron se poser au sommet d’un arbre voisin. Il y reste quelques temps, majestueux, imperturbable, semblant dominer la situation de sa grâce qui le caractérise. Arrêt sur image. J’écris le haïku qui monte. Histoire d’immortaliser la scène. Le haïku semble parfait pour figer cet instant de grâce. Je sais que je me souviendrais de cet instant.
Alors même que l’on ne l’attend pas, l’instant de grâce s’invite. Dérisoire échappatoire au milieu de l’errance et du marasme dans lequel le monde est plongé. Mais échappatoire quand même. Elle nous fait l’échappée belle. Ce moment parfait frôle l’indécence. On aimerait que tout le monde puisse y avoir accès. Je ne vais pas bouder mon bonheur mais il peut être d’une telle insolence parfois, qu’il est dur à soutenir.
A défaut, je vous le partage à travers un haïku :
Point de suspension
La grâce au sommet de l’arbre
Le héron se pose
Puissiez-vous trouver vos instants de grâce au milieu du chaos.
Cloé Przyluski